
12 Aug LETTRE OUVERTE À LA NATION ( 2eme PARTIE )
El Hadj Alpha Kabiné KABA
Ex-Capitaine de l’Armée
Ancien Gouverneur de la
Banque Centrale de la République
de Guinée (BCRG)
PREAMBULE
En publiant au mois de juin 1991 une lettre ouverte à la Nation Guinéenne et à l’opinion publique internationale, j’ai voulu la manifestation de la vérité en apportant chiffres à l’appui, la preuve de la machination ourdie contre ma modeste personne par le Gouvernement CONTE, dans l’unique dessein de mon élimination physique.
Comment comprendre et expliquer l’incapacité ahurissante de la Commission Technique de la Cour Suprême, à fournir, et ce jusqu’à ce jour, les justifications du scandale financier sans précédent portant sur une somme aussi importante que 250 000 000 000 de francs CFA, « volés » à un pays dont la situation économique est incontestablement des plus catastrophiques du Continent.
Le mutisme de cette fameuse commission Technique ne fait l’ombre d’un doute et l’occultation de cette aberrante affaire, a mobile ailleurs. Il suggère virtuellement mon
innocence.
De 1985 à ce jour, ni Horoya le journal de l’Etat, ni la Radio, ni la Télévision Guinéenne n’ont parlé de cette « affaire du siècle ».
Il est donc clairement établi que mon seul crime est mon appartenance à l’ethnie malinké d’abord, et d’avoir été au lendemain de la mort du Responsable Suprême de la Révolution Mars 1984, le cerveau pensant qui rassembla certains Officiers et Sous – Officiers dans l’unique but de débarrasser le peuple de Guinée de l’insupportable régime du PDG.
Mon crime est aussi ma démarcation catégorique, dès Janvier 1985, d’un appareil d’Etat foncièrement enclin aux pratiques du tribalisme, du népotisme, de la gabegie, et à toutes formes d’intimidations et d’assassinat.
Compte tenu de tous ces faits historiques, je restais pour le Général CONTE un homme dangereux qu’il fallait abattre par tous les moyens.
Les victimes de l’Etat despote et anti-démocratique de CONTE se comptent par centaines. Elles sont nombreuses qui souffrent dans leur chair et dans leur âme, contraintes à l’exil, spoliées de leurs biens et menacées en permanence de kidnapping, et d’arrestations arbitraires.
La présente édition voulue, sur instance de certains de mes compatriotes, n’a d’autres ambitions que de lever un coin du voile sur les méthodes machiavéliques du régime CONTE.
Chers Compatriotes,
La dernière décennie de notre siècle; dans tous les pays du monde et notamment en Afrique, est de plus en plus marquée par l’aspiration des peuples à la démocratie, à la paix et au bien être social.
Partout les régimes autocratiques et anti-progressistes sont secoués, balayés, laissant place à la manifestation de l’expressions de la volonté populaire.
La Guinée longtemps asservie, ne doit en aucune façon se marginaliser, dans un similacre de démocratie. Elle a, par le sang et la sueur de ses dignes fils, payé le lourd tribut des vicissitudes et des avatars d’un destin malheureusement souvent trop subjugué par des hommes imbus du pouvoir qui finit par les dénaturer.
Le peuple de Guinée n’est pas amnésique! Au tréfonds de son histoire, il saura puiser les ressources nécessaires lui permettant de galvaniser sa lutte séculaire de libération.
C’est pourquoi il me paraît impérieux d’éclairer le peuple sur les circonstances historiques de l’avènement du régime tribaliste et corrompu du Général – Président, ses méthodes abjectes de Gouvernement et d’en appeler enfin à la conscience nationale pour le sursaut libérateur.
A – GENESE DU PUTSCH DU 3/04/1984
Mon penchant pour les idéaux de liberté et de justice, et ma haine prononcée contre l’injustice et l’irrationnel ont toujours été des faits très remarqués dans les milieux où j’ai vécu.
Ancien prisonnier du camp Boiro, et las de supporter d’autres injustices et brimades de toutes sortes, j’ai demandé en fin 1982 ma mise en disponibilité à défaut d’obtenir ma retraite.
Mais grâce à mon insistance, j’ai finalement obtenu ma mise à la retraite pour compter du 1er janvier 1984, suivant Arrêté n° 12436 du 24 Novembre 1983.
Et moins de trois mois après mon départ à la retraite, le père de la nation, le Responsable Suprême de la Révolution, est mort le 26 Mars 1984. Je venais de réintégrer Aliamounou, mon village natal.
Devant cet évènement national sans précédent, la seule idée qui l’habitait était de tenter l’impossible pour débarrasser le peuple de Guinée de cette dictature sanglante endurée pendant 26 années de pouvoir sans partage.
Dans l’euphorie de ce mardi 27 mars, et dans le calme du village propice à la méditation, je me suis imposé quelques minutes de réflexion. Ce qui fit germer en moi l’idée d’organiser un putsch le plus discrètement et le plus rapidement possible, pour renverser le régime du PDG.
L’ambition était à hauts risques et d’une extrême délicatesse, tant le régime concerné était policier.
Pour mener l’opération, il fallait une équipe d’éléments très sûrs et ouverts aux idéaux de liberté et de justice.
Connaissant parfaitement mes camarades de l’armée, j’ai pu facilement dresser une liste de 25 officiers et sous-officiers, toutes ethnies confondues. Ce travail s’est effectué au village, quelques minutes après l’annonce du décès du Président Ahmed Sékou TOURE (Paix à son âme).
Ma grande préoccupation fut alors de me rendre à Conakry dans les meilleurs délais.
J’envisageai d’abord d’effectuer le voyage dans ma voiture. Je quittai le village le même jour à 9h00 pour Conakry. La voiture tomba en panne à Makono, un village situé à 15 Km de Kankan. Je l’y abandonnai sans même avoir le réflexe de la confier aux villageois.
Je rentrai à Kankan pour attendre le premier vol sur Conakry. Un avion fut annoncé pour le mercredi 28 Mars. Il venait chercher les membres de la famille TOURE qui devaient assister aux obsèques du Président.
Mercredi matin, nous nous rendîmes à l’aéroport qui n’avait jamais connu une telle affluence. C’est avec beaucoup de difficultés que j’ai pu accéder au bureau du Chef d’escale pour solliciter une place. Il m’exprima son vif regret de ne pouvoir me donner satisfaction.
Désespéré, et tentant absolument à rejoindre Conakry pour les rasions déjà évoquées, je me suis adressé directement au Commandant de bord Antoine CROSS. Ce dernier promit de m’embarquer. Pour cela, il a demandé à Conakry l’autorisation de faire un vol direct Kankan -Conakry sans passer par Labé où l’attendaient 19 autres membres de la « Grande Famille ».
La réponse au message était positive, et le Commandant CROSS disposait alors de 19 places supplémentaires pour Kankan. Il m’a embarqué le premier et gratuitement. Nous sommes arrivés à Conakry le même jour dans la soirée.
Le lendemain, jeudi 29 au matin, je me suis présenté au Camp Samory pour prendre contact avec mes camarades, muni de ma liste qui doit être encore dans mes affaires à Kankan, si elle n’a pas été enlevée ou détruite au cours des multiples perquisitions. Je peux tout de même rappeler les noms des 6 premiers qui sont :
1. Alpha Kabiné KABA Capitaine (ethnie Malinké)
2. Lansana CONTE Colonel (ethnie Soussou)
3. Mamadou Pathé BARRY Capitaine (ethnie Peulh)
4. Fodé Momo CAMARA Capitaine (ethnie Soussou)
5. Facinet TOURE Capitaine (ethnie Soussou)
6. Mamadou BALDET Capitaine (ethnie Peulh)
Ces premiers noms inscrits prouvent à suffisance que je suis un homme foncièrement opposé au tribalisme et au régionalisme érigés très tôt par le Colonel CONTE en système de commandement.
La première personne contactée ce matin du jeudi 29 Mars au Camp Samory, fut le Capitaine Mamadou Pathé BARRY. Son étonnement fut d’autant plus grand qu’il me croyait au village jouissant de ma retraite. Je lui ai exposé l’objet de ma visite qui n’était autre que l’organisation sans délai d’un putsch pour renverser le régime du PDG, à la faveur de la mort du Président Ahmed Sékou TOURE .Il a attentivement lu la liste, et a donné son accord en signant. C’était la deuxième signature après la mienne.
BARRY et moi sommes rendus chez le Capitaine Fodé Momo Camara qui ne trouva point d’objection au projet et nous donna son assentiment.
Sur ma demande, nous nous rendîmes chez le Colonel CONTE ; que je pressentais au poste de Chef d’Etat, en cas de succès. Madame Fanta SAKHO – épouse du Capitaine FODE Momo – nous présenta ses encouragements et demanda de faire le déplacement avec nous. Arrivés chez le Colonel, mes trois camarades restèrent devant le portail et me demandèrent d’aller présenter le projet. J’étais donc allé seul. L’accueil était enthousiaste; je lui remis la liste, en lui expliquant l’objet de cette visite matinale. Il la lut attentivement, marque un moment de pose puis m’exprima son agrément avant de me confier ses observations. En effet, il me confia qu’il y avait sur la liste 4 officiers qui ne lui inspiraient pas confiance dans une action de telle envergure.
Je lui ai fait savoir aussi qu’en cas de succès, il assumerait les fonctions de chef d’Etat. Et que j’avais mis mon nom en tête de liste pour endosser le premier la responsabilité de l’entreprise en cas d’échec.
J’ai donc poursuivi les contacts jusqu’à 23 heures pour recueillir l’avis de chacun. Malgré tout ce temps mis à courir à travers la ville et la banlieue (jusqu’à l’Ecole Normale Supérieure au km 41 vers Kindia), je n’avais pas pu voir ce jour les Capitaines Sékou Traoré et Facinet TOURE qui étaient absents chaque fois que je passais à leur domicile. Ce fut le lendemain vendredi 30 mars que j’ai rencontré le Capitaine Facinet TOURE à l’entrée du Camp Samory, et le Capitaine Sékou TRAORE devant le dispensaire El hadj Sinkoun KABA à Matam.
Je passai aussi toutes les casernes de la garnison de Conakry pour prendre contact avec les hommes. J’y avais trouvé des sous-officiers et hommes de troupe courageux et déterminés à mener l’opération. Ils y étaient déjà très impatients et surtout inquiets devant ce qu’ils avaient appelé la lenteur des officiers à passer à l’action. Et d’ailleurs le capitane Amara BANGOURA ne m’avait pas caché ce sentiment des éléments de la Marine Nationale, lors de mon passage dans cette Unité le vendredi 30 mars 1984.
A l’exception des 3 officiers sur les 4 au sujet desquels le Colonel CONTE avait émis le doute, tous adhérèrent à la cause.
L’opération fut conduite le plus pacifiquement possible, dans la discipline et dans un climat de responsabilité. Le changement s’était opéré dans le calme et sans effusion de sang.
JOURNEE DU 4 AVRIL 1984
A la faveur de l’accalmie qui s’annonçait, la salle du Haut Commandement aux usines militaires, fut remplie d’officiers arrivistes assoiffés de pouvoir, venus de tous les horizons.
Ceux que nous considérons à juste raison comme dignitaires du régime défunt, et que nous n’avions pas associés à l’entreprise, étaient les plus envahissants pour le partage du gâteau. Les plus sinistres étaient :
Sory DOUMBOUYA
Hervé Vincent BANGOURA
Makan CAMARA
Et ce dernier ne me l’avait pas caché, en me déclarant le 4 avril qu’il n’allait jamais participer s’il avait été informé avant le putsch. Ils auraient été nos bourreaux en cas d’échec. Leur conscience leur reproche bien quelque chose.
Devant cette avalanche de postulants (plus ou moins méritants) au pouvoir, j’ai choisi de retourner u village pour aller continuer à jouir paisiblement de ma retraite. Car pour moi, le seul désir qui m’entraînait, qui m’habitait, était de voir la GUINEE sur la voie de devenir un pays de droit et de justice. Un pays sur la voie de la démocratisation.
J’avais effectivement quitté la salle du Haut Commandement le jeudi 5 avril pour préparer mon retour sur Kankan.
Alors que je m’y attendais le moins, grand fut mon étonnement le 6 avril au petit matin, lorsque réveillé par un appel téléphonique, un officier supérieur m’annonça ma nomination au poste de Gouverneur de la Banque Centrale de la République de Guinée (BCRG).
Cette nomination serait venue de la proposition des Capitaines Facinet TOURE et Fodé Momo CAMARA qui, compte tenu de ma contribution, ne partageaient pas ma décision de ma retirer.
Un mois plus tard, le système bancaire et les assurances furent fusionnés pour former un seul département dénommé Ministère des Banques et Assurances.
Nous avions unanimement choisi le Colonel CONTE pour être le Président de la République en raison surtout de son calme et de sa sagesse apparents. Au fil du temps, nous nous sommes rendus compte qu’il y avait eu de notre part une grossière erreur d’appréciation.
B – DES CONTRADICTIONS AU SEIN DE L’EQUIPE GOUVERNEMENTALE
D’une manière générale, le colonel CONTE a érigé la division au sein de la jeune équipe comme système de commandement dans l’unique but de pérenniser son règne. Six mois après la prise du pouvoir, il avait déjà réussi à opposer les membres du Gouvernement les uns aux autres. Il déclara une guerre ouverte à tous les cadres de l’ethnie Malinké, qu’il considérait comme ses ennemis. A l’exception de Sory DOUMBOUYA, communément appelé aussi Sory BANGOURA, tant il s’était illustré dans la fourberie. J’ai des preuves concrètes de sa fourberie que je suis prêt à exposer au peuple de Guinée, s’il ne trouvait pas d’inconvénient.
Beaucoup d’innocents qui ne s’occupaient que de leur travail, se sont vus frustrés par cette politique malsaine du Président CONTE.
Ce comportement du Chef de l’Etat a contribué à tuer dans l’œuf toutes les bonnes volontés. L’atmosphère était pollué et infecté de considérations irrationnelles. Le tout alimenté par les parasites et escrocs de tous genres que sont les marabouts, les féticheurs et autres gens de castes, qui ne reculent devant rien pour avoir de l’argent facile.
Ces malhonnêtes personnes, alliées directes de Satan, croupissant dans la misère, ne trouvaient le bonheur que dans ce climat de division et de suspicion qu’ils ont sciemment crée et entretenu. Ils ont promis et continuent de promettre encore aux uns et aux autres monts et merveilles. Pure vue d’esprit.
Il va sans dire que dans une telle atmosphère de collaboration, le programme de développement du pays a été relégué au second plan. Et la lutte pour se maintenir au pouvoir, ou le briguer par tous les moyens (y compris les plus sadiques) était devenue l’occupation quotidienne de la plupart des responsables au sommet de l’Etat.
La vie était devenue infernale et la situation intenable. Et c’est avec beaucoup de peine que je constatais la détérioration progressive et irréversible de nos rapports de service et d’amitié. Et cela à tous les niveaux.
Le Chef de l’Etat commença par refuser de recevoir à son bureau sans audience, tous les ministres de l’ethnie Malinké. Il était devenu aussi allergique à nos visites à domicile. Je suis arrivé chez lui à 11h00 et l’ai trouvé avec Sory DOUMBOUYA son « Batoula ». Entendez son courtisan. L’accueil était si froid et si bizarre que je me suis retiré plus tôt que prévu. J’en avais ainsi eu la confirmation.
L’ambiance de confiance mutuelle entre les responsables a fait place à un climat de méfiance, de suspicion et de haine.
Compte tenu de ce qui précède, il n’est point besoin de démontrer qu’une telles situation d’injustice et de frustration engendrerait des agressivités qui déboucheraient inévitablement sur un déchirement. Voilà la Genèse des évènements tragiques du 4 juillet 1985, cyniquement préparés par CONTE et son groupe, et au cours desquels le Général a demandé aux soussous de déclarer la guerre aux Malinkés.
Ce massacre avait coûté la vie à des centaines d’innocents dont le seul crime était leur appartenance à l’ethnie d’Ahmed Sékou TOURE et de Diarra TRAORE. Aucune couche socio-professionnelle n’avait été épargnée : hauts cadres civils et militaires, commerçants et étudiants. La plupart furent sommairement exécutés les 8 et 9 juillet 1985.
Les plus chanceux furent pillés, torturés et humiliés avant de passer quelques années en prison, et dans des conditions inhumaines.
Cette sauvagerie irrita la conscience nationale, et provoqua une profonde indignation dans le monde entier.
Ainsi donc, la désapprobation du pouvoir de CONTE fut sans appel et le changement apparut aux yeux des guinéens comme une impérieuse nécessité.
C – LES POINTS DE DISSENSION ENTRE LE CHEF DE L’ETAT ET MOI
En dehors du climat très malsain, le torchon commençait à brûler entre le Président et moi pour plusieurs raisons dont les plus importantes seront évoquées avec force détails dans les lignes qui suivent.
1 – LA MISSION DU CAMBODGE (INDOCHINE) DE SON COUSIN CISSE DE LA SOCIETE NAVALE GUINEENNE
Prenant les derniers publics pour des biens personnels, le Colonel CONTE commença très tôt à puiser l’argent dans les caisses de l’Etat.
Un jour, le Président m’envoya un de ses cousins du nom de CISSE, agent de la Société Navale Guinéenne. Monsieur CISSE était porteur d’un BON manuscrit pour la sortie d’une somme de deux cent mille (200 000) dollars US. Soit cent millions (100 000 000) de francs CFA à cette époque. Le bon était signé du Président. J’avais d’abord tiqué au vu du bon et signifier de le rencontrer pour avoir plus de précision. Je me rendis à la Présidence à cet effet.
Il me répondit que cette somme était destinée à un féticheur au Cambodge (Indochine) à qui il demandait de travailler à la consolidation et à la protection du Comité Militaire de Redressement National (CMRN).
J’étais décontenancé, irrité et le cœur meurtri devant ce comportement profondément irrationnel du Premier Magistrat de la République.
Cette somme avait été tirée des caisses de la Banque Nationale des Services Extérieurs (BNSE), alors dirigée par Monsieur Boubou KABA.
Cette Banque n’ayant pu payer que 180 000 dollars, le complément soit 20 000 $ US, fut emprunté auprès de Monsieur JAMAL, un commerçant libanais qui tenait un magasin de vente de meubles à l’immeuble CISSE et FRERES (Conakry I).
2 – TOUJOURS DES BONS MANUSCRITS POUR DES FINS OCCULTES
Un autre jour, le Chef de l’Etat m’envoya par le Lieutenant Abdouramane DIALLO, un bon manuscrit pour une somme de 700 000 (sept cent mille) Sylis, sans aucune explication sur le papier. Devant mon désir d’avoir des explications sur la destination de ladite somme, le Lieutenant se vit contrarié, puis reprit le bon et se retira. J’apprendrai en fin de journée que la somme fut effectivement payée sur instruction de Monsieur le Vice Gouverneur de la Banque.
Il y avait là des signes évidents d’un régime autocratique qui s’annonçaient à l’horizon.
La Présidence de la République est un service bien structuré et autonome; avec son budget de fonctionnement et son gestionnaire. Mais c’est à la Banque que le Président envoie régulièrement des bons manuscrits pour décaisser d’importantes sommes d’argent.
Encore si ces bons étaient établis à partir des registres de comptabilité ouverts à la Présidence, ceci leur confèrerait un caractère de dépenses de souveraineté. Et même dans ce cas, il serait plus indiqué de les adresser au Trésor Public.
Mais le Chef avait une conception très vague de la Banque d’Etat, même des derniers publics. Il en avait une idée de véritables profanes, pour qui le Président peut puiser à volonté l’argent de la Banque. Traitant désormais directement avec ses hommes de main, d’importantes sommes d’argent ont été frauduleusement soustraites de cette manière ; et à des fins purement personnelles.
3 – LE MARCHE DE 20 000 TONNES DE RIZ NET IMPORTE DE LA SIERRA-LEONE
Au mois de juillet 1984, le Ministre du Commerce Extérieur me fit parvenir un marché gré à gré concernant la fourniture de 20 000 tonnes de riz net à importer, pour une valeur totale de 5 260 000 dollars US. Soit 2 630 000 000 francs CFA. Le fournisseur était un certain Monsieur SOUMAH, homme d’affaire en Sierra Léone.
La Banque a retourné le marché avec des objections. Le lendemain matin, c’est le Ministre du Commerce Extérieur qui vient lui-même me demander de signer le marché. Le seul avantage apparent était que le prix du riz devait être payé sur 360 jours.
Devant mon refus de signer, le ministre m’a lancé le proverbe malinké suivant : « si tu vois l’intestin du poulet rigide, c’est qu’un bâtonnet se trouve à l’intérieur ». Cela voulait dire simplement que derrière ce marché se trouvait une main dure. Je m’obstinai toujours à ne pas signer. Il reprit les documents et me quitta très courroucé.
Quelques instants après, je reçus un appel téléphonique du Chef de l’Etat qui m’invita à me présenter à son bureau. Ce que je fis. Il me déclara qu’il avait donné son accord pour la commande de ce riz. Et me demanda donc de signer le marché qu’il avait déjà sur son bureau. Je m’exécutai malgré moi.
Une semaine après, le même Ministre revint me voir de la part du Président pour me demander de payer la totalité du prix du riz.
Sous la même contrainte, cette somme de 5 260 000 dollars US a été libérée le 23 Juillet 1984 par Télex n° 611.
Et si mes souvenirs sont exacts, le fournisseur (partenaire potentiel de CONTE), n’a pas livré plus du tiers de la commande faite. Mes allégations peuvent être vérifiées au moyen des archives de l’ex-entreprise d’Etat ALIMAG.
A partir de ce moment, je devenais un homme très gênant pour le Président. Un ennemi à abattre. Et tous les plans machiavéliques ont été tracés à ce dessein, mais en vain. Tous ses problèmes personnels sont traités désormais avec Monsieur DIALLO le Vice Gouverneur.
4 – LA CREATION DE L’AGENCE DES ASSUREURS DE PARIS (UAP) A CONAKRY
En ma qualité de Ministre Gouverneur des Banques et Assurances, je fus mis à l’écart de toutes les négociations qui ont abouti à la création de l’Agence de l’Union des Assureurs de Paris (UAP) à Conakry.
Le texte du Protocole d’Accord que le Président de l’UAP a adressé au Ministre Gouverneur des Banques et Assurances le 4 octobre 1984 pour approbation, fut intercepté à la Présidence de la République. Le Président CONTE donna son accord pour la création de l’Agence de Conakry avant même que les documents me soient parvenus.
Madame CHASSAGNE, Présidente de l’UAP s’était rendue à Conakry le 24 novembre 1984 sur invitation du Chef de l’Etat, sans aucune consultation de la Banque. Le RA, ami personnel du Président CONTE.
5 – EMISSION DES NOUVEAUX SIGNES MONETAIRES (LE FRANC GUINEEN)
Toutes les négociations au sujet de l’émission des nouveaux signes monétaires furent menées sans la participation ni du Ministre de l’Economie et des Finances, ni de celle du Ministre -Gouverneur des Banques et Assurances. Parce que ces deux responsables dont les secteurs sont directement concernés, étaient de l’ethnie Malinké.
Le 25 octobre 1984, Monsieur Sékou Lenaud (Directeur de l’Emission et du Crédit) m’annonça que j’étais demandé par le Président de la République, le même jour à 11h00.
C’est à la Présidence que je fus informé de la décision du CMRN de changer la monnaie; et du choix porté sur la société Brade Bury Wilkinson pour l’impression des nouveaux signes.
Monsieur LENAUD, l’expert anglais et moi-même devrions quitter Conakry le lendemain 26 Mars pour la signature du contrat à Londres.
Le Ministre de l’Economie et des Finances n’ayant pas été associé, sa signature fut photocopiée sur une note personnelle qu’il m’avait adressée quelques jours avant, et que je détenais encore fort heureusement.
Monsieur KEITA devait lui même s’étonner de voir sa signature sur les différentes coupures du nouveau franc Guinéen.
Je dois faire remarquer que tous les cadres Malinkés travaillaient dans le même climat de méfiance et de résignation.
En tant qu’instigateur du putsch du 3 avril, c’était avec consternation que je voyais le Colonel CONTE brandir le drapeau de la division et du régionalisme.
En effet, le 3 Avril 1984, il n’y avait ni Soussou, ni Peulh, ni Malinké. Il n’y a avait que des soldats guinéens déterminés à mener le combat du changement pour la liberté du peuple et qui avaient unanimement choisi le Colonel CONTE comme leur Chef pour faire de la Guinée un pays de droit et de justice.
Mais au lieu d’instaurer le dialogue et la concertation comme arme, CONTE a plutôt institué de sinistres méthodes et principes de dictature pour mieux régner. Le temps nous dira la vérité.
Il est clair que dans un tel climat malsain, la collaboration devenait très difficile, voire impossible. J’avais donc choisi de démissionner et de demande, même temps ma mise à la retraite. Mes demandes furent accordées les 11 février et 16 mars 1985.
D – LES MACHINATIONS OURDIES CONTRE MOI APRES LA DEMISSION
Devenu un élément très gênant pour lui, le Colonel CONTE tentera irrésistiblement de me nuire par tous les moyens. Tous les motifs seront inventés pour éventuellement justifier l’exécution du crime ourdi.
1 – Deux officiers de la section des anti-gangs de Conakry, munis de pistolets-mitrailleurs (PMAK), furent dépêchés à Kankan, dans la première semaine du mois de juin, pour m’assassiner. Comme le Capitaine Mamadou MANSARE l’avait été dans la nuit du 18 au 19 janvier 1985.
Je venais tout juste de rentrer de Bamako (Kati) où j’avais été évacué le 19 avril 1985 pour des soins médicaux à la suite de mon accident survenu le 14 avril 1985.
Plutôt que de commettre ce crime odieux, les deux « missionnaires » m’avaient sauvé la vie en me permettant de me rendre à Bamako (Mali) pour mon contrôle médical à l’hôpital de Kati. Un laissez-passer m’avait été délivré à cet effet.
Irrité par l’article paru dans J.A. N° 1273 du 29 Mai 1985, je me rendis à Conakry le 11 Juin, pour démentir les fausses rumeurs qui circulaient sur ma personne. Cette obstination de ma part a dangereusement compromis les deux officiers de police et le Directeur de la Sûreté de Kankan, qui avaient signalé à Conakry mon absence de Kankan. Chose que j’ignorais personnellement.
Ils ont tous été sévèrement sanctionnés pour l’inexécution de l’ordre reçu : l’ordre de m’assassiner. Le Chef de mission menacé de mort, a pu s’exiler en juillet et m’a trouvé à Abidjan. Le Directeur de la Sûreté de Kankan, Monsieur Dopavogui, a été suspendu de ses fonctions pendant plusieurs années. Il vient d’être rétabli dans ses fonctions.
2 – Pendant que j’étais encore à Conakry, un arrêt de jugement et un mandat d’arrêt international du Tribunal de Première Instance de Conakry l me concernant, ont été signés par un certain Blaise Pascal KEITA 1er Juge d’Instruction de Conakry l, qui n’hésita pas à condamner un innocent, au mépris du droit. Honte à la justice guinéenne !
Une nouvelle opération visant à me mettre en état d’arrestation fut aussitôt lancée le 13 juin 1985. J’ai réussi à y échapper le 29 juin, date à laquelle j’ai quitté Conakry vers 17 heures pour Bamako où je suis arrivé le 1er juillet.
J’ai laissé en détention arbitraire les membres de ma famille dont les noms suivent :
Hadja N’Mah Touré (mon épouse)
Mohamed KABA (mon fils)
Mory KABA
Amadou Dias Condé (mes beaux fils)
Leur alliance avec ma famille leur a valu leur mise en état d’arrestation, au mépris de droit et de la justice.
Les trois premiers ont été incarcérés dans les locaux disciplinaires de la Sûreté Nationale. Tandis que le Docteur Condé a purgé sa peine dans les cellules du Commissariat Spécial du Port Autonome, où il a subi une semaine de diète, en signe d’accueil.
A la suite des évènements du 4 juillet 1985, ils ont été embarqués à bord de notre propre Land-Rover, et conduits aux « 32 escaliers » du Camp Alpha Yaya pour être confondus avec les éléments du soi-disant « complot Diarra ».
Mais, à ce que cela pourrait être étonnant, c’est le Commandant Alhousseyni FOFANA qui les a sauvés, en les retournant à la Sûreté, en précisant que l’affaire KABA n’avait rien de commun avec les évènements du 4 juillet. Ce dont je lui resterai éternellement reconnaissant.
La barbarie de ce régime n’est plus à démontrer. C’est véritablement la jungle, où ne règne que la loi du plus fort.
Au demeurant, tout laisse croire que l’arrêt du jugement et le mandat d’arrêt international n’ont été émis que pour justifier mon assassinat commandité. Cette manoeuvre en effet est pratique courante sous les régimes sanguinaires et policiers. Ainsi on tue impunément et prétextant que l’inculpé a été abattu au cours de sa fuite par les forces de l’ordre.
3 – LE KIDNAPPING ORGANISE LE 12 AOUT 1985 À BAMAKO
Des agents de police, sous le commandement d’un Inspecteur Soussou, ont été désignés pour se rendre à Bamako le lundi 12 août, avec pour mission de me kidnapper.
L’ordre de mission a été signé à Conakry par le Ministre de l’Intérieur le samedi 10 août. J’en ai été informé le même jour à 17 Heures par un appel téléphonique en provenance de Paris. J’ai quitté Bamako aux environs de 19 heures pour Abidjan, en compagnie de mon épouse Hadja N’mah TOURE qui venait de me rejoindre après sa détention arbitraire à la prison de Conakry.
Nous sommes arrivés le 12 août à Abidjan où je réside depuis cette date.
La mission était effectivement arrivée à Bamako à la date prévue, par le vol d’Air Guinée. Elle a passé une semaine au Motel de Djikoronipara avant de regagner Conakry, bredouille.
Compte tenu de ce qui précède, on est en droit de se demander quels rapports ces machinations, et ces tentatives d’assassinat avaient avec la récupération des « 500 000 000 de dollars américains détournés ». Le Général CONTE tient à tout prix à me tuer. Comme si mon sang pouvait remplacer tous ces fallacieux milliards. Je crois que le pays a beaucoup plus besoin de ses fonds que de ma tête.
Je rappelle ainsi qu’il est indiqué dans la première édition du 13 Juin 1991 qu’il ne s’agit dans cette affaire ni de détournement d’argent, ni de contrat de construction. Mais d’une histoire montée de toutes pièces pour des fins inavouables. Nous ne sommes plus loin du bout du tunnel où la vérité éclatera au grand jour.
E – LES PILLAGES ORGANISES CHEZ MOI AU COURS DES PERQUISITIONS
Après l’échec de toutes ces machinations, des missions mixtes composées d’agents de police, de gendarmes et de militaires, se sont croisées chez moi à Kankan et au village, pour procéder à des perquisitions systématiques dans le but de découvrir les prétendants milliards détournés.
Ils n’y ont pas trouvé un seul syli. Mais ces malhonnêtes agents en avaient profités pour piller tous mes biens dont je ne mentionne ici que quelques-uns :
– une voiture Mercedes à l’état neuf, enlevée par le Lieutenant-colonel MAGASSOUBA Lamine qui l’a offerte à son fils aîné, un Sous-lieutenant de l’armée
– une tronçonneuse de l’armée
– un groupe électrogène de 10 kwa malhonnêtement repris par Elhadj Moriba « Gnimba » qui me l’avait vendu un an auparavant. Cet homme sans foi me croyait déjà mort en commettant cet acte
– six machines manuelles à fabriquer les briques de terre sans ciment, dont une a été enlevées à Kankan, et cinq autres au port de Conakry
– un fusil de chasse calibre 12 (un canon)
– une caméra vidéo
Au niveau de Conakry la Land-Rover de mon fils a été saisie par la Sûreté Nationale le 15 juin 1985, pendant que son propriétaire (Mohamed Kaba) était arbitrairement jeté dan les prisons de le Sûreté.
F – DE MA MORALITE DE GESTIONNAIRE
J’avais accédé à la responsabilité pécuniaire pour la première fois le 26 mars 1956. En qualité de Chef Comptable de la Première Compagnie de Bataillon Autonome de Soudan Occidental (BASO) à Kayes (actuel Mali)).
Depuis cette date, j’ai gravi tous les échelons de cette carrière, sans que la moindre faute ne me soit reprochée par qui que ce soit, et où que j’ai servi
J’ai assumé successivement les responsabilités de Chef Comptable d’unités administratives de l’armée, de Trésorier de zones militaires, de Directeur des Entreprises et Sociétés d’Etat, et enfin de Gouverneur de la Banque Centrale de la République de Guinée (BCRG) du 7 avril 1984 au 31 mars 1985.
Durant cette longue carrière de 29 années, je ne me souviens pas avoir causé du tort à qui que ce soit. Les actes que j’avais posés dans l’armée ont toujours contribué à l’amélioration des conditions de vie des hommes à tous les niveaux. Ils sont encore nombreux en activité ou à la retraite, qui peuvent aujourd’hui en témoigner.
Et ce ne sont pas les anciens chauffeurs et autre cadres de l’ex COTRA du MDR de Faranah, et le personnel du système bancaire guinéen qui diront le contraire.
Le Lieutenant-colonel Sory DOUMBAYA, Messieurs Yaya KEITA et Saïdou DIALLO ont été respectivement mes chefs à l’intendance militaire, à la Société Navale Guinéenne (SNG) et à la société sectorielle d’Etat SECOFI. Qu’il me soit permis d’ouvrir la polémique afin qu’ils se prononcent sur ma moralité de gestionnaire. Tout comme l’ancien Vice-Gouverneur de la BCRG (encore Monsieur Saïdou DIALLO) et les différents directeurs des banques spécialisées, ainsi que ceux des services centraux de la BCRG. Notamment Monsieur Alpha Ousmane Diallo, Ancien Directeur de la Comptabilité Centrale de la BCRG.
Eu égard à l’obstination du Général CONTE à me faire du tort, je ne peux clore ces différents chapitres qui précèdent sans réitérer mon appel à tous les partis politiques, à toutes les associations démocratiques du pays et aux chefs religieux, afin qu’ils amènent le Chef d’Etat à mettre sur pied une commission nationale d’enquête pour faire la lumière, et toute la lumière sur cette affaire du siècle qui perdure dans un silence coupable du Président CONTE.
G – MA POSITION AU PLAN POLITIQUE
Nous sommes à la croisée des chemins. Et déjà mon silence est interprété comme une indifférence devant l’intérêt supérieur du peuple.
En effet, le peuple de Guinée a plus que jamais besoin de la coalition de toutes ses forces vives pour le débarrasser des mains sales qui l’ont souillé et continuent de le souiller depuis 8 années.
Je suis entièrement engagé dans la lutte contre ce régime tyrannique et liberticide. C’est pourquoi, quoi que ceci me coûtera, je ne marchanderai pas mon appartenance à l’opposition. Car pour moi, l’objectif et les idéaux étant communs, tous les partis de ce bord doivent fermer un front uni pour vaincre l’ennemi. Les partis de l’opposition doivent taire leurs divergences partisanes et lutter résolument pour l’avènement d’un ordre politique nouveau.
L’Histoire est implacable. Nous devons la faire et non la subir sous le joug du Général CONTE. L’Histoire rendra le verdict au moment propice, et son tribunal sera impitoyable.
Nous devons faire notre unité – je ne le dirai jamais assez – pour nous débarrasser de ce régime autocratique et sanguinaire. Le peuple a trop souffert de ses sinistres méthodes et principes de gouvernement qui sont entre autres : la trahison, la gabegie, l’injustice, l’irrationnel, les exécutions sommaires, l’abus d’autorité et l’enrichissement illicite. Tout cela est apparu au grand jour et le peuple s’en est aperçu.
L’opposition a une mission historique à accomplir : celle de refondre la société guinéenne. Seule l’union des forces vives de la nation pourra conduire à la victoire. Les évènements tragiques enregistrés ces derniers temps à N’Zérékoré, Conakry, Fria, Kindia, et plus près de nous à Kankan, prouvent à suffisance que nous glissons vers la violence.
Ce que nous, opposants au régime dictatorial en place, devons appeler de tous nos vœux, c’est l’accession au pouvoir par la voie pacifique. La voie idéale de tous les peuples. Mais face à ce pouvoir toujours prêt à transgresser tous les principes et toutes les règles de la vie sociale, les guinéens doivent être en état d’alerte.
L’armée guinéenne – à l’instar de toutes les armées du monde – doit être un instrument du pouvoir d’Etat, non l’instrument d’un homme. Fut-il le Général-Président. C’est pour cela que dans un régime démocratique, l’armée doit prêter serment aux textes, à la loi fondamentale, à la constitution et non au Président de la République, qui finit par se prendre pour la République. C’est dire que l’armée doit exprimer son loyalisme aux textes et à la constitution.
Ainsi les vaillants officiers, sous-officiers et hommes de troupe qui sont restés dignes et loyaux, malgré la misère qu’ils endurent depuis l’accession de cette clique au pouvoir, ont aujourd’hui un impérieux devoir à accomplir au nom du peuple et pour le peuple.
En effet ils doivent, sans hésitations ni complaisance aucune, se tenir prêts à bouter ces assassin, ces voleurs et ces égoïstes hors du pouvoir, à la moindre réticence des affameurs du peuple à l’instauration effective de la démocratie en Guinée.
EN GUISE DE CONCLUSION
Les maux qui minent la société guinéenne sont nombreux. Il est évident qu’ils sont cultivés et entretenus par la volonté satanique d’une poignée d’hommes à la tête de l’Etat, et qui trouvent leur compte dans une domination agressive et meurtrière.
Je souhaite qu’Allah le Tout-puissant, dans sa divine bonté, inspire ceux qui se croient indispensables, leur donne la sagesse, et implante dans leur cœur l’amour (le vrai) de leurs prochaines, de leurs frères. Si guinéens, nous aimons notre pays, nous devons permettre à ceux qui peuvent présider aux postes de responsabilité. Là où nous pouvons dialoguer véritablement, il n’est point besoin d’imposer ni la force, ni la roublerie encore moins le commerce de conscience.
Parce que, guinéens aimant cette terre qui nous a vus naître, nous ne devons pas compromettre la vie de nos enfants, en remuant en nous les vilains sentiments que sont la haine ethnique et le mépris social.
Il est urgent pour nous de faire l’unité de toutes les forces vives, afin que dans un consensus national, le peuple de Guinée prenne en main la conduite de son destin.
Notre premier consensus doit se faire autour de ces qualités qu’il faut pour assumer de hautes responsabilités au sommet de l’Etat. L’intérêt général primant avant tout dans nos choix politiques; la perspicacité des idées doit l’emporter sur la densité de nos rancoeurs tribales.
Tous les responsables de partis doivent avoir à cœur de faire éviter à la Guinée l’explosion sociale.
Il importe dès lors d’envisager résolument au plan politique la tenue d’une conférence nationale souveraine. De ses travaux sortiront les stratégies de l’instauration d’un régime véritablement démocratique, d’un Etat de droit dans lequel seront garantis les droits inaliénables de l’homme, la justice sociale et surtout la séparation effective des pouvoirs, seul garant des libertés individuelles et collectives.
Je ne saurais terminer sans exprimer ma profonde gratitude à tous ceux qui, de près ou de loin, chaque jour de mon exil forcé, ne cessent de m’apporter leur soutien moral et matériel.
Fait à Abidjan, le 13 Février 1992.
No Comments